Une minute avec... Marielle Vidal, assistante sociale en faveur des élèves

Quel est votre parcours ?

J'ai eu mon diplôme d’État d'assistante de service social après une formation de 3 ans et j'ai commencé à l'Éducation nationale en septembre 2000. Dès la première année, j'ai découvert le travail social en milieu scolaire. J’ai choisi de passer le concours, qui est académique, afin de devenir titulaire. Après mon concours, j'ai été affectée pendant trois ans dans le Tarn-et-Garonne puis en Haute-Garonne. J’ai exercé dans plusieurs établissements : collège, lycée, lycée professionnel. Mon secteur actuel se situe sur le Nord de la Haute-Garonne.
Depuis l'an dernier, je me suis engagée dans la réorganisation du service et j'interviens sur une unité de prévention primaire (UPP) dans les écoles primaires et élémentaires de la Haute-Garonne.

Quel est votre métier au sein du service social en faveur des élèves ? Il y a trois services sociaux au sein de l’Éducation nationale : celui du supérieur, le CROUS et les universités, celui du personnel et celui en faveur des élèves. Moi, je suis assistante sociale en faveur des élèves. Notre public prioritaire, c'est l'enfant. Concrètement, notre travail se situe dans le cadre de la protection et nous accompagnons l'enfant dans sa scolarité pour que ça se passe le mieux possible et pour lui donner le maximum d'armes pour se projeter dans sa vie d’adulte, en tant que citoyen.

Quelles sont vos missions ?

Nos missions sont définies par une circulaire nationale avec des priorités académiques en fonction du terrain.

La première mission pour moi, c'est la contribution à la protection de l'enfance. Dans l'Éducation nationale, on est les premiers experts sur cette question-là. Nous sommes formés à l'écoute, à l'évaluation de ces situations, à savoir à qui et quand il faut signaler. Nous conseillons beaucoup les équipes sur ce sujet, nous avons mis en place des formations de sensibilisation pour les équipes dans les écoles, collèges et lycées. Cela permet de les faire monter en compétence pour qu’ils puissent repérer les signaux d’alerte en protection de l’enfance.

Il y a également l'accompagnement à la parentalité. Des parents qui peuvent être en difficulté au niveau éducatif : nous écoutons leurs difficultés, nous accompagnons leurs demandes, nous orientons vers des prises en charge adaptées. Nous contribuons aussi à la participation au climat scolaire, à la lutte contre le harcèlement scolaire, au décrochage, à l'absentéisme, au bien-être et à la santé mentale pour l’accès aux droits et à l'inclusion des enfants à besoins particuliers. Et nous avons un rôle important de médiation, entre l’enfant et la famille mais également entre les familles et l’institution scolaire.

Quelles sont les spécificités des assistantes sociales en faveur des élèves ?

Nous pouvons recevoir l'enfant sans autorisation parentale et sans en informer les parents. Nous sommes soumis au secret professionnel, ce qui peut parfois être une difficulté, car il faut être dans le partage avec les équipes mais être aussi vigilant à ce qui est de l'intérêt de l'enfant dans les informations que l’on communique.

Notre spécificité, par rapport à un autre service social, c'est que l’enfant est rarement celui qui vient nous voir et nous faire la demande. C'est souvent les équipes, les parents ou les partenaires extérieurs. Il faut donc arriver à rencontrer l'enfant, lui expliquer notre cadre de mission et faire émerger sa demande et ses besoins.

Enfin, nous sommes les seuls professionnels de l’Éducation nationale habilités à se rendre à domicile notamment pour toutes les situations concernant l’absentéisme ou le décrochage scolaire.

Comment cela s’articule avec vos interlocuteurs ?

Nos premiers partenaires de proximité sont les parents, puis les chefs d’établissement et les IEN pour le premier degré, la vie scolaire, les CPE, les infirmières avec qui nous travaillons au quotidien, les psychologues, les professeurs et les AESH.

Nous avons également des partenaires extérieurs comme l’aide sociale à l’enfance (ASE) ou la justice, quand il y a des mesures éducatives, ou encore les centres médico-psycho-pédagogique quand il y a parfois des prises en charge.

Comment êtes-vous organisés dans la Haute-Garonne ?

Nous sommes des personnels itinérants de la DSDEN. Notre supérieur hiérarchique c’est le DASEN et notre conseillère technique, chef de service ; nous ne sommes pas rattachés aux établissements de façon hiérarchique. Nous sommes 48 assistantes sociales à temps plein dans le service pour couvrir tout le département et nous fonctionnons en pôle. C’est-à-dire que nous faisons moins de permanence physique dans les établissements mais que nous sommes interpelés par le biais d’une fiche saisine. Les établissements nous sollicitent sur des situations sur lesquelles, soit nous faisons du conseil technique, soit nous nous rendons sur place pour rencontrer le jeune, évaluer la situation et l’accompagner.

Nous avons une particularité sur la Haute-Garonne, qui est l’intervention en primaire. L’idée est également de conseiller les équipes et d’évaluer les situations. Les écoles, par le biais d’une fiche recueil, nous sollicitent quand il y a des inquiétudes autour de la protection de l’enfance et de l’absentéisme, et nous rencontrons les familles et enfants pour évaluer les situations et proposer des accompagnements.  
Quand les élèves arrivent en 6ème, les situations sont parfois dégradées, une intervention en amont est donc importante.  

Sur combien d’établissements intervenez-vous ?

Je suis en présentiel 2 jours par semaine au collège de Villemur-sur-Tarn, je suis chargée du collège de Fronton en pôle, c’est-à-dire qu’on me saisit par le biais d’une fiche saisine et ensuite j’ai, en binôme, deux circonscriptions en primaire (HG23 et HG6) soit un total de 71 écoles. Le fait d’être en binôme sur le primaire permet de ne pas se sentir seul et isolé et de croiser nos regards lorsque nous faisons face à une situation complexe.

Une journée type ?

J’ai des rendez-vous fixés à la journée, des élèves à voir ou des écoles à visiter. Mais il y a toujours des imprévus. Quand il y a des urgences en protection de l’enfance, cela passe toujours en priorité, notamment autour des violences intrafamiliales et sexuelles.

Qu’est-ce qui vous plait le plus dans votre métier ?

Le côté humain, être dans le relationnel. Nous accompagnons les élèves pour faire émerger les pépites qu’ils ont en eux et qu’ils ne voient pas forcément, nous les aidons sur la confiance et l’estime de soi.
Pour faire ce métier, il faut être dans l’empathie mais également savoir prendre du recul et de la distance, ne pas être dans l’affect. Nous le voyons parfois avec les équipes des écoles primaires qui peuvent être en difficulté dans des situations avec les familles, en tant qu’assistantes sociales nous avons cette capacité de mettre un peu cela à distance.

Existe-t-il un décalage entre le métier perçu et la réalité au quotidien ?

Complètement, et c’est une lutte depuis 24 ans.
Au niveau de l’institution, il existe encore l’image de l’assistante sociale liée aux fonds sociaux et aux aides financières, et ce n’est pourtant pas le cœur de notre métier. De plus, le terme « je signale à l’assistante sociale » est encore utilisé. Ce terme « signaler » a beaucoup de connotations, et les familles arrivent parfois à reculons, sont dans la méfiance. Nous rappelons sans cesse aux écoles que nous ne sommes pas une cellule de signalement mais un passage de relai, un membre de l’équipe.

Au niveau des familles, c’est une bataille quotidienne face aux préjugés qu’il y a autour du service social. Nous apparaissons comme celles qui vont créer des problèmes et placer les enfants. Alors que ce n’est pas le but de notre métier. À chaque premier entretien avec les familles, avant de les connaitre, il faut les mettre en confiance par rapport à cela car en effet, ça peut les freiner dans l’évocation de leurs difficultés. Le nombre réel de placements que j’ai connu dans ma carrière se compte sur les doigts de la main. De plus, la décision du placement d’un enfant, c’est à la justice qu’elle revient.

Quelle est votre devise ?

Je dis souvent que la différence ne me fait pas peur, elle m’enrichit. C’est un leitmotiv dans ma vie professionnelle et personnelle.

Quel est votre mentor ?

Je n’en ai pas mais des personnalités comme Magyd Cherfid, l’ancien chanteur de Zebda, me touche beaucoup. L’école a été importante pour lui et je me reconnais dans ses valeurs collectives et humanistes.

Si vous étiez une œuvre ?

En livre, j’aime beaucoup les poèmes de Bernard Dimey. Et en musique, HK et les Saltimbanks.

Mise à jour : avril 2024