Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées

SEEDH

Dans le cadre de la semaine européenne pour l'emploi des personnes handicapées, découvrez ci-dessous deux portraits de personnels de l'académie.

 

Portrait de Chloé, professeure des écoles dans l'académie de Toulouse

Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?

J’ai un parcours traditionnel, j’ai eu mon bac, j’ai fait une licence LLCE Espagnol puis je me suis orientée vers un master professorat des écoles à l’ESPE de Toulouse. J’ai commencé en tant que stagiaire pendant un an avec des CP/CE1 puis j’ai été titularisée. Aujourd’hui, cela fait 5 ans que j’enseigne en CE1 à l’école Courrège de Toulouse.

Pouvez-vous nous parler de votre handicap ?

À l’âge de 2 ans et demi, j’ai été opérée d’une tumeur au cerveau. Depuis, je suis tétraplégique avec des difficultés au niveau des jambes et des bras. Je me déplace en fauteuil électrique en classe.

Avez-vous rencontré des difficultés liées à votre handicap lors de votre parcours professionnel ?

Au tout début, il a fallu du temps pour mettre en place les différents aménagements. Le premier mois de ma carrière, je n’avais pas encore d’assistante en classe ni de matériel spécifique.
Il y a également des difficultés au quotidien et je suis obligée de m’adapter. Par exemple, je ne peux pas allée à la piscine donc je dois m’organiser avec mes collègues pour me faire remplacer.

Quels sont les autres aménagements dont vous avez bénéficié ?

Je bénéficie d’une assistante. J’ai été dotée d’un vidéoprojecteur et d’un ordinateur qui fait tablette. Je suis aussi à temps partiel car c’est un métier avec beaucoup de travail personnel. Il faut connaitre ses limites, je sais que je ne pourrais pas faire les 5 jours d’école, les corrections et les préparations à la maison. Ce temps partiel me permet de déléguer certains enseignements, comme par exemple le sport que je ne peux pas enseigner.

Comment fonctionnez-vous avec votre APSH actuellement ?

J’ai eu la même personne pendant 5 ans et depuis cette rentrée j’ai une nouvelle assistante. C’est une nouvelle relation à créer.  
L’assistante c’est pour moi une aide primordiale. Elle m’aide à écrire au tableau, à faire des photocopies, elle me seconde dans toutes les tâches physiques et aide les petits à sortir leurs affaires. C’est un appui, je me sens soutenue.
D’un autre côté, la difficulté est de trouver sa place et de bien définir le rôle de chacune.
Moi, je dois affirmer mon rôle d’enseignante et l’assistante doit également trouver sa place car elle a un rôle majeur mais qui reste secondaire, elle ne peut pas prendre de décisions, sanctionner un élève, être seule avec eux... C’est difficile de trouver le bon ajustement.

Quels conseils donneriez-vous à une personne qui commence sa carrière et qui est en situation de handicap ?

Il faut communiquer sur ses besoins auprès du rectorat ou du médecin du travail, il faut faire des demandes d’aide en fonction de ses besoins car il y a souvent des solutions à l’échelle de l’école ou du rectorat, il ne faut pas hésiter.
Il faut également oser s’imposer auprès des élèves, affirmer son rôle.

Qu’est-ce qui vous plaît dans ce métier ?

Transmettre et partager des savoirs, des connaissances. Le fait d’enseigner est valorisant.
Et j’aime sensibiliser les enfants au handicap. Je vois la différence entre le début de l’année, où ils se questionnent, et les mois suivants où cela devient automatique de m’ouvrir la porte, de ramasser quelque chose qui tombe… Ça me plaît de leur ouvrir le regard sur le handicap, ils partent avec moins d’a priori et de craintes.
Et le fait d’enseigner est valorisant.

Portrait d'Isabelle, secrétaire de direction dans un lycée de l'Aveyron

Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?

J’ai passé le concours en 1996 en tant que travailleuse handicapée car j’avais déjà mon problème aux yeux à l’époque.

Jusqu’en 2000 j’étais à l’IUFM Nord-Pas-de-Calais à l’agence comptable ; j’avais demandé une affectation dans une grande structure pour que mon handicap ne soit pas une entrave pour mes collègues. Ensuite, je suis allée dans un établissement où j’ai rencontré des problèmes avec un chef d’établissement qui n’acceptait pas le handicap et j’ai donc été mise en arrêt avant de rejoindre un des lycées de la ville de Cambrai.

Puis, j’ai été mutée en Aveyron au service com de la DSDEN et enfin aujourd’hui en tant que secrétaire au collège de Rignac depuis 2019.

Pouvez-vous nous décrire ce métier ?

En tant que secrétaire du chef d’établissement, j’ai un poste très diversifié. Je touche à toute la partie administrative car c’est un petit établissement : courriers, bourses, gestion des AED, des élèves et des professeurs... Mon APSH (Accompagnant des Personnels en Situation de Handicap) est là à plein temps pour m’aider et faire mon complément de service, étant moi à mi-temps.

Pouvez-vous nous parler de votre handicap ?

J’ai une dégénérescence maculaire bilatérale qui a commencé quand j’avais 20 ans, c’est très rare d’avoir cette DMLA (liée à l’âge) si jeune. À l’œil gauche il me reste 1/20ème que les médecins ont réussi à sauver ; à l’œil droit j’ai une tâche au bord de la macula qui me gêne et me fatigue mais qui ne m’empêche pas de voir. La DMLA, pour les personnes de moins de 40 ans, a été renommée la DMJ, dégénérescence maculaire juvénile. À l’époque ce n’était pas très connu, on ne savait pas.

Quelles sont les difficultés rencontrées lors de votre parcours professionnel ?

Au début j’ai eu beaucoup de chance car je suis tombée sur un chef de service très compréhensif. J’avais ma reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) mais il n’y avait pas d’aménagement prévu ; il a adapté mes horaires de lui-même en me proposant de faire moins d’heures par semaine et de rattraper pendant les vacances.

À l’opposé, j’ai connu une chef d’établissement qui, lorsqu’on a dit « handicap » et « temps partiel », s’est montrée peu réceptive…

Quand j’ai repris après la naissance de mon fils, le médecin du rectorat de Lille a fait toutes les démarches pour que je puisse avoir une APSH. Là, ma vie a commencé à s’améliorer au niveau professionnel. Depuis 2010 j’ai eu 6 APSH avec lesquelles ça s’est toujours bien passé.

Puis depuis février, j’ai également du matériel adapté comme un écran plus grand et un Clover book.

Comment fonctionnez-vous avec votre APSH actuellement ?

Nous partageons l’ensemble des tâches mais je lui laisse également de l’autonomie en lui confiant totalement le dossier des bourses. Quand j’arrive l’après-midi, on fait le point sur ce qu’il s’est passé puis elle me laisse la place devant l’ordinateur. C’est fluide.

Comment ça se passe avec vos collègues, au niveau de l’intégration, de l’acceptabilité ?

Ayant un handicap invisible, je mets au courant dès mon arrivée les collègues les plus proches. Pour les autres, certains posent des questions auxquelles je réponds sans problème et certaines personnes n’ont même pas encore remarqué. Je suis une collègue comme une autre.

Quels conseils donneriez-vous à une personne qui rencontrerait une situation similaire ?

Je conseillerais de ne pas hésiter à demander de l’aide et de l’accompagnement, pour le matériel par exemple, il faut oser. J’ai eu la chance de tomber sur des personnes qui ont fait beaucoup pour moi et qui ont pris l’initiative de faire des demandes d’aide. Mais il faut en parler, et ne pas hésiter à demander, ce n’est pas une honte, on doit vivre avec une béquille, on marche très bien avec mais il faut adapter la route.

Des choses à ajouter ?

On peut très bien travailler en étant handicapée.

Mise à jour : novembre 2022